Il y a soixante-dix-neuf ans, le 22 juin 1944, un fait de la Seconde Guerre mondiale a eu lieu dans le Craonnais, impliquant des habitants de La Selle-Craonnaise et des Renazéens.
Ce jour-là, des résistants renazéens ont attaqué deux Messerschmitt 109 de l'armée allemande, qui s'étaient posés dans un champ, au lieu-dit Queue de Viel, à 300 mètres à l'ouest du bourg.
"J'ai rencontré à de nombreuses reprises Joseph Courcier fils, l'un des acteurs de cet événement, hélas disparu il y a peu", souligne Pierre Joufflineau, historien local, qui relate l'évènement.
Sur fond de Débarquement
Tout débute le 21 juin 1944, tôt le matin. "Deux avions allemands tournoyaient dans le ciel craonnais pour trouver un lieu où atterrir en urgence. Il a été dit que les pilotes étaient des déserteurs qui tentaient de fuir, mais c'est faux, ils ont eu apparemment une panne de carburant."
L'un se pose sans problème, l'autre heurte un arbre. Mais pas de blessé.
Pierre Joufflineau rappelle que le Débarquement avait eu lieu quinze jours plus tôt. "Il y avait donc de la tension. Les Allemands étaient partis de La Selle-Craonnaise mais il en restait à la Kommandantur de Saint-Aignan."
Des villageois sont alors allés voir ce qu'il se passait dans le champ. Parmi eux, Joseph Courcier fils, 16 ans. Il a pu prendre une photo, la seule de l'évènement. "Il était un agent de liaison des résistants du maquis de la forêt d'Ombrée."
L'opération tourne mal
Le groupe de résistance décide d'organiser une opération pour incendier les avions, prendre la radio et les armes. Environ huit hommes se portent volontaires, dont quatre du maquis de la forêt d'Ombrée qui s'attachèrent les services d'autres extérieurs car, eux, avaient des armes. Mais l'opération a mal tourné.
À leur arrivée, le groupe tombe sur deux Allemands, un de la Kommandantur et un des pilotes. Le premier se rend sans résister, mais le pilote, lui, sort un revolver, ce qui oblige les résistants à tirer. Horst Bögel, jeune sous-officier qui allait avoir 21 ans, meurt.
"L'opération a été considérée comme ratée, m'a confié Joseph Courcier fils, car ils ont dû fuir sans incendier les avions. Ils ont pu néanmoins récupérer un revolver, une mitraillette et un fusil de guerre."
La réplique allemande ne s'est pas fait attendre. "Quelques jours après, les Allemands sont passés dans les rues de La Selle-Craonnaise en mitraillant des façades de maisons. On a longtemps vu les impacts dans le village." Et puis, pire, "il a été dit que les Allemands allaient tuer dix villageois en représailles. C'était un peu la règle à l'époque." La tension monte d'un cran dans le village.
"Alors le maire, Henri Lecomte, intervient. Il est allé à la Kommandantur pour essayer d'apaiser les choses et a notamment salué la dépouille du soldat allemand mort. Un geste qui a été visiblement apprécié, car finalement il n'y a pas eu de représailles."
Un Oradour-sur-Glane évité ?
Une chance quand on sait qu'à l'époque, la malheureusement célèbre division Das Reich, qui avait, le 10 juin 1944 (soit douze jours avant la mort du soldat Bögel), commis les abominations à Oradour-sur-Glane "était dans le Segréen. Elle remontait de Tulle pour combattre sur le front du Débarquement."
Si finalement il n'y a pas eu de représailles, les Allemands ont cependant exigé que quatre villageois gardent les deux avions, jusqu'à ce qu'ils soient rapatriés quelques jours plus tard vers Craon.
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