Point de fuite, c'est le titre de l'exposition des œuvres de Bo Taslé d'Héliand, dans la nef carrée de l'église La Jaillette à Louvaines à partir du 28 juin 2024. Installé en Anjou avec sa famille, au Lion-d'Angers, l'artiste plasticien a choisi la mise en commun de peintures récentes et d'une série La Part sacrée de l'autre, des tableaux grand format, créée quand il vivait avec la tribu des Turkana au nord du Kenya, " un travail en réaction contre la représentation froide et objective de notre planète représentée par Google Earth et les images voyeuristes des satellites et des caméras de sécurité qui nous envahissent. J'ai remplacé le pixel par le grain de terre directement prélevé sur le sol et peint dessus les gens avec qui je vivais ". C'est sa vue " d'oiseau ".
L'infini du sentiment
" Les peintures récentes sont davantage expressionnistes, des vis-à-vis de mes peintures africaines, naïves et interrogatives. " L'exposition est faite " d'empathie des hommes ", et de "l'infini du sentiment ". Les toiles seront accrochées aux murs intérieurs de l'église, " en collier de perles ". Une vidéo sera projetée, " base d'un dialogue de sons ". Bo Taslé d'Héliand a beaucoup voyagé : États-Unis, Moyen-Orient, Asie, Afrique. Son ouverture au monde, aux cultures différentes, remonte à l'enfance environnée de chefs-d'œuvre en péril. Cet expert en restauration d'œuvres d'art a été sensibilisé par sa mère à leur fragilité face au temps. En détournant des outils, il entreprend ses premières créations, principalement avec le papier de soie utilisé pour encoller le dos des œuvres en réparation. Ce papier lui servira de fond de toile qu'il manipulera selon différentes méthodes.
Après l'École nationale supérieure des arts décoratifs de Paris, Bo Taslé d'Héliand affine une technique de peinture singulière, inspirée par les effets de l'entropie sur la matière. Il maroufle le papier en couches successives, en apposant sur chacune une peinture acrylique ou de l'encre de Chine. Sur chaque étage, la peinture encore fraîche, il provoque un ruissellement d'eau qui ôtera une partie de la peinture tout en révélant les traces de son passage, " sa toile est vivante ".
La création se matérialise par des séries illustrant un même sujet et, quand une œuvre ne porte plus en elle l'amorce de la suivante, la série est terminée, le désir n'est plus. L'artiste s'attache à " révéler leur forme iconique et intemporelle ". De la technique des icônes byzantines, il garde le principe de l'ornementation qui oriente l'œil vers le regard des personnages représentés. De son intérêt pour les peintures orientales, il garde la présence du vide que l'on retrouve dans certains lavis exécutés en Chine.
La spiritualité est omniprésente
Il nourrit un intérêt pour le " rapport vide plein ", qui le conduit vers un mode de représentation redimensionnant l'humain dans l'espace. La spiritualité est omniprésente. Les peintures sont pensées comme des icônes d'une religion sans référence et encore en devenir, dont on ne verrait Dieu que par son absence. Si l'humain est au centre de son travail, les regards que l'on y croise se portent sur un ailleurs insondable, si ce n'est pour rencontrer notre propre regard d'observateur. Ses œuvres sont très inspirantes. À découvrir.
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