Bruno Emery, 45 ans, originaire de la région lavalloise, avait repris L'Aquarelle, en 2003, à seulement 24 ans, à M. et Mme Fallourd qui partaient à la retraite après quinze ans de gérance.
"Je n'avais que 24 ans, c'était ma première affaire et à l'époque peu de jeunes se lançaient. Mes clients au début me prenaient pour un stagiaire !" s'amuse Bruno qui avait précédemment travaillé dans un deux-étoiles Michelin et faisait les saisons à Courchevel.
Sa femme, Jennifer, le rejoindra plus tard. Elle travaillait dans des palaces en Belgique.
Ils arrêtent sur leur meilleur bilan
Leur cuisine entièrement faite maison a su séduire. "On n'a pas une grande carte mais tout est frais, même le pain et les pâtes sucrées, salées, etc."
Leur clientèle adore et apprécie le cadre, vue sur la Mayenne. "On a nos habitués le midi et le week-end. On sait à peu près qui viendra manger. Notre soirée Saint-Sylvestre se fait quasiment avec toujours les mêmes personnes."
Le couple arrête "sur notre meilleur bilan".
Pour raisons familiales
La décision a été prise "pour des raisons familiales liées aux enfants. Nous en avons trois (13, 11 et 6 ans) et on les voit trop peu. Nous travaillons beaucoup, depuis des années. C'est du six jours sur sept. On ne prend que trois semaines de congé par an depuis trois ans, sinon c'était qu'une semaine. On travaille les jours fériés et week-end. On manque toutes nos fêtes familiales, etc. Notre fils le plus grand, qui a 13 ans, s'occupe des deux autres. Quand on lui a annoncé, il en a pleuré de joie." Le couple a mis un an à prendre cette décision. "On a été très stressés de le dire aux clients, mais ils ont très bien compris."
Bruno a retrouvé un emploi en cuisine collective au collège/lycée Saint-Michel.
Jennifer, 38 ans, passe une formation en comptabilité et tentera des concours pour rentrer dans la fonction publique.
Tout le personnel replacé
Le couple est heureux d'avoir vu ses salariés et apprentis retrouver des postes ailleurs. "C'était important pour nous."
Le couple a formé "entre 30 et 40 apprentis. L'un d'eux nous a particulièrement marqués. Il était sénégalais, sans famille ici et ne parlait pas un mot de français. Les membres du restaurant étaient en quelque sorte sa seule famille. Il a réussi à avoir son examen avec la meilleure note du concours. Il travaille aujourd'hui dans un grand établissement dans le Sud."
Le restaurant deviendra une maison
Le restaurant deviendra une maison. Une personnalité locale a décidé de l'acheter et de le transformer en maison.
"La reprise sous forme de restaurant aurait été compliquée. Car nous avions comme une sorte de dérogation à vie par rapport à l'accès handicapé, mais si nous l'avions vendu, il aurait fallu que le nouveau gérant fasse les mises aux normes. Cela nécessitait une rampe, un ascenseur, de casser les toilettes, etc. Il y en aurait eu rien, que pour ce volet, pour plus de 100 000 €. Cela plombait tout projet de reprise", souligne-t-il.
Il y aura sûrement des larmes
Le couple avait rénové le restaurant il y a dix ans. "Pour cela, on avait fermé un mois et demi. On a quasiment tout vendu."
Le 8 novembre, le restaurant fermera définitivement.
"Des personnes ont pris leur après-midi pour profiter jusqu'au bout avec nous", se réjouit le couple, qui ne le cache pas : "Il y aura sûrement des larmes."
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