"Cela fait trente-six ans que nous sommes installés dans le Craonnais." Serge et Sylvie Riveron, 63 ans, originaires de Saint-Saturnin-du-Limet et de Bouchamps-lès-Craon (Mayenne), se sont rencontrés à la Boule d'or, un restaurant hôtel renommé à Craon jusqu'à sa fermeture il y a plus de vingt ans.
"J'ai fait mon apprentissage cuisine chez Berthe, la patronne. J'avais 15 ans, se rappelle Serge Riveron. Sylvie faisait des extras." " J'étais en première année de faculté de psychologie à Nantes, j'avais besoin de gagner un peu d'argent", se souvient celle-ci.
Un restaurant rustique
Serge a travaillé à droite et à gauche dans les environs de Laval avant d'effectuer son service militaire à 19 ans. "À mon retour, on est partis en saisons été/hiver aux Arcs à Bourg-Saint-Maurice. Puis on a eu l'opportunité de nous installer à Ballots."
La commune de Ballots (Mayenne) souhaitait ouvrir un restaurant. "Elle était propriétaire des murs, à l'époque." À 27 ans, Serge et Sylvie ouvrent donc L'Auberge du Mouillotin. "On y est restés seize ans. C'était une affaire qui tournait bien. On a fait les banquets, les baptêmes, les mariages, les soirées après les matches de football... C'était le temps de l'omelette norvégienne flambée, de la pièce montée et du poisson au beurre blanc. On a eu des apprentis supers." En 2004, Serge et Sylvie ont décidé de vendre le fonds et les murs, dont ils étaient devenus propriétaires. "J'ai dit à ma fille, Augusta, que j'emmenais à l'école, un matin, en passant devant l'ancienne pizzeria La Strada, qui était alors en liquidation judiciaire, qu'on serait bien là. Sylvie et moi, on s'est positionnés pendant l'adjudication." Ils ont été retenus et ont ouvert, en mars 2005, Le Grenier à popote.
L'adresse du restaurant Le Grenier à popote à Craon, au 46, route de Nantes, s'est fait connaître comme un restaurant traditionnel à la cuisine rustique, à l'image de la déco insolite : "Nous avons accumulé, au fil des années, plein d'objets d'antiquités, de notre propre fait et aussi de clients qui nous en apportaient. On a monté un véritable musée", avouent-ils sur un ton amusé. Les clients patientaient ainsi en posant leur regard sur eux. "À certains, cela leur remémorait le temps de leur grand-mère."
Une cuisine généreuse
S'inscrivant dans les pas de sa grand-mère et de ses tantes, "de bonnes cuisinières qui préparaient des plats riches, au beurre", Serge, un passionné, a mis au goût du jour une des recettes de sa grand-mère, la terrine de lapin : "J'en ai fait des tonnes. Plein de clients sont devenus des amis, même les papis et mamies se sentaient comme à la maison, chez nous."
Samedi 14 septembre 2024, Serge et Sylvie ont cessé leur activité : "On a organisé un pot de départ, c'était "open bar". Les gens sont venus nous remercier. On était très émus. On a eu une clientèle fidèle. Le relationnel va nous manquer un peu."
Depuis, une nouvelle vie commence. "On prend du temps pour nos deux petites-filles." Serge et Sylvie l'admettent : "Avec notre activité, on a raté un tas de trucs, les repas en famille, par exemple. Notre fille, on l'a élevée au restaurant, le transat dans la plonge, le biberon pendant l'office. Elle n'en a pas souffert mais elle n'a pas voulu travailler dans le commerce."
Toutes ces années, Serge et Sylvie ont pris juste quinze jours de vacances l'été, une semaine l'hiver. Tout le reste du temps, ils l'ont passé aux fourneaux et en salle. "On a passé des moments exceptionnels."
Pendant la crise sanitaire de la Covid-19, les restaurateurs se sont réinventés en proposant la vente de plats à emporter. "Cela a bien fonctionné. Encore aujourd'hui, des personnes viennent en commander."
"Surtout pas de contrainte"
"On a été vingt ans à Craon, ça a passé vite." La page est tournée. Ça faisait trois ans qu'ils étaient en quête d'un repreneur. Simon et Leïla, un couple de trentenaires, restaurateurs à Entrammes (Mayenne), leur succéderont d'ici à la fin de l'année. "Quand ils ont poussé la porte du restaurant, ils se sont tout de suite projetés."
Serge et Sylvie, jeunes retraités, partent le cœur léger. "De se retrouver à ne rien faire, ça fait drôle." Il leur faudra un peu de temps pour s'habituer à cette nouvelle façon de vivre, ralentir. Déjà, Serge envisage d'aller à la pêche, Sylvie de s'adonner aux loisirs créatifs et de s'occuper de ses petites-filles. "Mais surtout pas de contrainte. La tête dans le guidon c'est terminé."
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Merci de ce bel article